mercredi 30 septembre 2015

Le rêve(il)

Un dernier billet difficile, avant des plus chouettes hein, allez, siouplait, dîtes ??? :-)

September ends...


WAKE UP!


Bon, ça arrive. C'est bientôt.

Genre l’ouverture de la Maison de Santé évoquée dans ce blog c'est demain en fait...

Une dernière journée de dingue,  un dodo et c'est bon !

J'en aurais chié quand même. 3 ans qu'on est sur le coup. 9 mois que je suis installé "à l'ancienne", en attendant...

Un été sans vacances ou presque, à gérer à l'arrache les derniers "détails" (en fait de détails, à peu près tout : le fonctionnement du bâtiment, des professionnels, des salariés, de la logistique, etc.).

Réfléchir à tout ce genre de chose quand j'étais remplaçant, genre l'an dernier quand on s'est tapé la confection du Projet de Santé (dossier conséquent, présenté à l'ARS pour débloquer autorisations et subventions, disant en gros ce qu'est la santé dans le territoire actuellement, ce qu'on prévoit pour tenter d'améliorer la situation en se groupant, le tout relativement sérieux car des projets parfois travaillés/présentés depuis longtemps sont refusés... mais on l'a fait en 2 mois et accepté sans soucis :-) alors qu'on finalisait nos thèses entre quelques gros remplas, ben ça allait, on avait droit à des breaks ensuite quand on voulait, reprendre son souffle c'est important, sinon c'est chiant, on craque, comme en lisant cette phrase/paragraphe trop longue.

Et bien pendant 9 mois j'ai pas soufflé, toujours sur la brèche. Et après je vais vous dire que s'installer il faut, c'est trop cool, on m'en félicite alors que je burnoute allègrement, et ces dernières semaines n'en parlons pas vu le sprint final surréaliste dont on touche à peine du bout du doigt la ligne d'arrivée depuis quelques jours.

Je pense que j'ai vraiment connu ce qu'étaient des conditions de travail burnoutantes comme malheureusement trop de médecins connaissent et n'évitent pas assez. Ajouté aux difficultées professionnelles des soucis familiaux - sans rapport avec mon travail mais probablement plus durs à vivre en étant déjà épuisé - dans la dernière ligne droite, j'ai quasi craqué.

J'ai tenu parce que quand même la MG installé c'est intellectuellement vraiment cool, que les patients sont adorables, mais surtout sachant que la porte était ouverte vers ce que je voulais vraiment, qu'on a travaillé pour coller à notre idéal, qu'il y avait une date, et que mes amis/remplaçants réguliers/futurs associés ont été un soutien sans limite, la lueur dans les ténèbres.

La suite, hein, ça sera bien mieux hein : fini sans le rendez-vous du matin qui se fini à 15h20 comme hier quand on bosse aussi l'aprem, le boulot seul dans son cabinet, l'absence de secrétaire et le téléphone qui sonne, fini de gérer seul l'informatisation, d'assumer en plus de mon boulot une partie de celui de mon associé inorganisé, fini la journée ou je vois mon fils dormir en partant et en rentrant, fini les locaux #CauchemardEnCabinet.

Une parenthèse se ferme, une page se tourne, on va reprendre le "s'installer il faut, c'est trop cool". Et disons qu'on essai de recoller aussi à la belle histoire annoncée au début de ce blog, avec juste une intro un peu hardcore.


Le jour VA se lever demain.


à bientôt pour du mieux !

dimanche 6 septembre 2015

Le sprint final...


Ça y est, on touche au but.

La bonne nouvelle : plus longtemps à tenir ce mode de vie exténuant, c'est pour début octobre, donc musique de circonstance :

Wake me up when september ends
#badumtshhhh
(oui encore du Green Day, rassurez-vous j'écoute pas du tout que ça, par ailleurs je suis bien moins fan de celle là que de la précédente, mais vu que ça fait des mois que j'aimerai roupiller en attendant l'ouverture when september ends pour qu'on me wake me up, le cœur telle une grenade prête à dégoupiller, tout ça, ben je la mets :-p)

Dans moins d'un mois à date précise doit ouvrir la maison de santé, l'aboutissement du projet dont je vous ai déjà parlé dès le début de ce blog.

Et on a pas le choix dans la date (!), on ne peut reporter : pour le déménagement, des professionnels ont résilié leurs anciens abonnements, loyers, etc. à la veille au soir, un des anciens médecins pend sa retraite ce jour là (les nouveaux s'installant), les secrétaires devront répondre au tel, etc.
Y'a même eu une réunion publique pour l’annoncer, sous fond de grandes tensions financières d'une collectivité territoriale quasi ruinée (ça a plus débattu gros sous que projet de santé...).
La population est donc prévenue de la date, les premiers rendez vous dans la nouvelle structure vont bientôt commencer à être posés par nous +/- par internet.
Faut dire que déjà, depuis 2 ans et demi on a pas chaumé.

Et ben pourtant c'est pas encore gagné :

  • à l'heure actuelle on n'a pas encore l'électricité... Le vote d'une extension de budget pour le compteur électrique n'a eu lieu auprès de nous élus qu'il y a 3 semaines
  • en démarchant les opérateurs télécoms on s'est rendu compte in extremis (nous usagers et non les bâtisseurs propriétaires) que la bâtiment n'était pas raccordé au réseau téléphonique (et sans téléphone ni internet, ben on peut pas bosser... donc pas ouvrir) ; c'est le point le plus critique je dirais
  • dans le genre, pas (encore) de boite au lettres même si le courrier arrive déjà
  • on sera locataire mais on n'a pas même pas encore signé le moindre contrat de location
  • pas encore défini qui fait le ménage
  • les secrétaires on les a mais pas encore moyen de contractualiser 
  • la structure juridique (une SISA, qui chapeaute le tout, est employeur, etc.) rame à être mise en place 
  • les clefs de répartition des coûts entre les professionnels ne sont pas du tout définis 
  • pas de règlement intérieur écrit (pourtant on nous a dit que c'est très important)
  • on (les professionnels de santé) n'est pas invité à la pré-livraison ni la livraison du bâtiment, qui devrait être à peine une semaine avant l'ouverture si pas trop de retard (youpi l'aménagement simple et la livraison de trucs lourds genre tables d'examen)
  • d'ailleurs y'a pleins de trucs qu'on a pas encore commandé, voire qu'on ignore nécessiter à ce jour
  • divers détails moins graves si pas réglés pour la rentrée mais quand même : pas de structure pour mettre nos plaques, et autres petits éléments manquants dans le bâtiment...
Bref, TOUT VA BIEN !

Autant dire que les prochains jours vont être longs...
Et que c'est l'enfer pour faire tout ça en plus de la vrai vie personnelle et professionnelle et professionnelle bien chargé de toute l'équipe rejoignant le navire.

Mais heureusement, ce qu'il y a au bout nous plaît, on en rêve tous, alors on se serre les coudes et on met les bouchées doubles, ça fait d'ailleurs plaisir à voir l'esprit d'équipe qui se dégage, c'est de très bon augure pour la suite :-)

Et heureusement car l'idée de quelques jours de retard ne nous parait tout simplement pas acceptable.

Conclusion :
Ça va être chouette ! (bientôt) (mais pas encore tout de suite) (mais il me tarde) (mais c'est pas gagné)



PS pour expliquer en quelques mots toutes ces choses restant à faire au dernier moment :
On a signé un protocole cadre avec la collectivité locale que début juillet, ça a traîné malgré nos demandes depuis un an, puis on nous proposait des loyers aberrants alors il a fallut négocier.
Et tant qu'on avait pas cadré ça, pas question d'engager des démarches, sinon on aurait été piégé.
On a choisi d'être locataire d'un bâtiment appartenant à la collectivité, ça a quelques inconvénients, mais ça a l'avantage de laisser la porte ouverte, une issue de secours pour fuir si ça se passait mal. C'est important :-)


mardi 14 juillet 2015

Il vous en prie !

La récompense.


...
Il n'a pas le temps de bloguer.
Il aime vraiment ce qu'il fait.
Tellement qu'il se bat pour le promouvoir, le faire savoir, donner envie.
Et ça marcherait presque, ça en ferait presque rêver certain.
On lui remet même un prix à cet effet !

Sauf que quand même, c'est pas facile.
Juste avant qu'on le récompense, il passe 3 jours de suite à bosser ramer quasi 13 heures/jours dans de mauvaises conditions (tout à rattraper niveau dossiers patients, pas de secrétaire, le téléphone qui sonne tout le temps, pas de collègue pour s'organiser correctement...).
Même que y'a tellement de boulot qu'en rentrant le soir, il continue jusqu'à tard sur son logiciel en ligne.
Et son nourrisson de fils, tant pis.
Et l'anniversaire de sa femme tant pis.
Elle lui vérifiera sa compta avec bébé dans les bras à la place, comme les femmes de médecins d’antan.
Et une de ses meilleures amies qui passe sa thèse (même pas loin en plus) tant pis.
Et l'enterrement de vie de garçon d'un de ses potes tant pis.
Ou alors il pouvait aussi ne pas aller à Paris se faire féliciter sur sa super installation que pour l'instant il trouve tout pourri et répartir les visites en trop et le boulot administratif sur son jeudi "de repos" (théorique) comme il fait d'habitude.

Se faire féliciter sur son travail et l'exemplarité de son projet, alors qu'on passe une semaine de merde sur celui ci... ?

Hypocrisie dans sa volonté de partager sa passion ?
Syndrome dissociatif ?

En tout cas, ce n'est pas cet exemple là qu'il veut montrer.
Ce mode de vie révolu est justement tout ce qu'il veut dénoncer.
En laissant passer ce message, ces images du médecin trop dévoué mais qui roule à tombeau ouvert vers le burn-out, il se tirerait une balle dans le pied.

Mais en s'engageant dans ces conditions, il savait que c'était du temporaire.

Et heureusement, pour tenir, il trouve plein de satisfactions à pratiquer le métier qu'il aime.
Certes, il rame alors qu'il pourrait se faciliter la tache en torchant ses consultations et bâclant le travail à rattraper laissé par son prédécesseur.
Beaucoup le font.

Mais s'il ne faisait pas ce travail, il serait encore moins honnête avec lui même, moins intègre, et pas fier du tout de son boulot.
Alors il rame, mais se satisfait du travail de fourmi.
Puis il aime vraiment le métier de médecin installé.
D'ailleurs même parmi les médecins les plus déçus par leur installation, en prenant du recul y'en a qui trouvent ça pas mal quand même, parfois.
Mais comme une amie lui a bien dit "la vocation ne doit pas justifier des conditions de travail inacceptables".

Et du coup, ça le renforce d'autant plus dans son but : créer ses propres conditions de travail acceptables (voir idéales) pour exercer sa vocation.
Ça lui rajoute du boulot, créer une MSP cohérente en partant d'une page blanche (et non créer un simple regroupement géographique de professionnel), une révolution sanitaire locale, ce n'est pas une mince affaire.

Ça, se sera la récompense !

Et heureusement il n'est pas seul sur ce coup là.
Histoire bien débutée, "To be continued"
Ce sera le "Prix de la meilleure première installation... groupée" le vrai prix !

Il aimerait avoir le temps de vous en parler plus (c'est l'objet de ce blog), mais vous l'aurez compris, il est assez occupé.
Il va essayer, promis.
Il va aussi faire attention à être plus intègre, à ne pas se burnouter, à se faire remplacer et "profiter" de l'aide de ses futurs associés.
Et privilégier tant que possible sa vie privée.
Bref à se respecter lui-même en attendant le 'Nirvana' annoncé pour l'automne.

Le plus gros est passé !


PS : Ajout de l'illustration inspirée à l'ami @grain2gouns par cet article.
Au passage, son blog compilant ses dessins, c'est ici : https://medessin.wordpress.com/
merci ;-)

jeudi 19 février 2015

Minorité.

Parenthèse dans le récit de mon installation, faisant écho au premier billet sur les raisons de ce blog.

Un peu de motivation.
Nous ne serions qu'une minorité à nous installer...
Le message général qui semble s'imposer, encore lu/entendu récemment serait "s'installer, ça n'en vaut pas la peine, laissez tomber", et il est malheureusement trop suivi... je l'espère juste pas aveuglément.
Et bien moi je veux m'installer, et permettre d'ouvrir les yeux à quelques un sur le fait que ça peut en valoir la peine.

Je veux être la minorité !


paroles et traduction ici : http://www.lacoccinelle.net/250706.html


I want to be the minority
I don't need your authority
Down with the moral majority
'Cause I want to be the minority
...

Je n'ai pas fait 9 ans d'études, pour abandonner si près du but, et tourner le dos à ma vocation : médecin généraliste installé / traitant / de famille, appelez cela comme vous voulez. Même si les conditions de vie seraient plus douces, moi je ne veux pas ni rester remplaçant (en me privant d'un vrai suivi au long cours et de la liberté d'agir sans se soucier d'un titulaire et de son fonctionnement habituel ¹), ni être fonctionnaire (hôpital, PMI, etc., des métiers différents).

Je veux tenter le coup !

...
I pledge allegiance to the underworld
One nation under dog 
There of which I stand alone
A face in the crowd
Unsung, against the mold
Without a doubt
Singled out
The only way I know
...
La seule voie que je connaisse...

Je ne dis pas non plus que tout le monde doit s'installer ! S'installer ou le rester doit rester un choix, le fruit d'une analyse fine, comme pour nos prescriptions, d'un rapport bénéfice/risques constamment ré-évalué ².

Certains l'ont très bien fait, comme Jaddo quand elle nous explique pourquoi elle veut rester remplaçante (pour l'instant mais pas forcément à vie), ou SylvainASK qui décrit son expérience de 3 métiers différents : le libéral, le territorial et l'hospitalier - ne manque qu'une alternative intéressante : le médecin "de famille" salarié - avec une nostalgie pour la "vraie" médecine générale vers laquelle il retournerai bien, mais les conditions actuelles ne lui plaisent pas. Choix argumentés => j'accepte parfaitement.

Ce que je n'accepte pas, ce sont les messages généraux exhortant les jeunes médecins à fuir la médecine générale ("si vous ne travaillez pas, vous finirez généralistes..." ³, "ha, mais t'es sûr tu veux pas faire une spécialité ?", "il ne FAUT pas s'installer en ce moment", etc.). De la part de trop d'universitaires, de proches (famille), voir même (et ça me semble presque pire) de la part de médecins généralistes installés. De la part de médecins ayant abandonné ou sur le point de le faire, passe encore, mais j'ai entendu trop de 'bons' médecins qui pourtant font la profession dont je (/ils) rêve(/nt), voire même l'entretiennent, l'embellissent, et ne sont pas près de lâcher, relayer ce message fataliste... Faites ce que je dis, pas ce que je fais...

Et il y a tant de jeunes confrères qui n'ont pas toujours évalué leur balance bénéfice/risque installation, et reprennent tous en cœur ces messages - leur semblant justes car venant de personnes qu'ils respectent - sans même réaliser qu'il y a un tel manque de médecin qu'ils peuvent s'installer où ils veulent, en choisissant leurs conditions/association/localisation/etc., ce qui quand la pénurie de médecin sera terminée ne sera plus le cas.

Je ne veux pas faire partie de groupe là.

...
Stepped out of the line
Like a sheep runs from the herd
Marching out of time
To my own beat now
The only way I know
'Cause I want to be the minority...
...

Je veux faire partie de cette minorité,  qui fait le métier qu'il veut, et a la "chance " d'avoir l'embarras du choix, la demande surpassant largement l'offre.

Alors oui, je suis conscient qu'une page dorée de la médecine libérale s'est tournée, que notre génération connaîtra beaucoup de difficultés pour exercer sa vocation - l'actualité est vraiment inquiétante, faut pas se mettre des œillères - mais je ne compte pas rester les bras croisés en tournant le dos à ce que j'aime.
Certes, les conditions sont mauvaises et vont vers une dégradation, mais je préfère m'installer en luttant contre celle ci, en me battant pour créer un nouveau modèle conforme à mes idéaux, plutôt que de contempler passivement l'évolution des choses en remplaçant (et subissant quand même la dégradation du système de soin) ou m'engageant dans la fonction publique (pas sûr que pour eux non plus les choses s'améliorent). ⁴


And remember one thing: regardless who the power that be are, the people that you elect, the people that I elect in the office, remember: you have the fucking power, we're the fucking leaders, don't let these bastards dictate your life or trying to tell you what to do, all right?


Nous avons le pouvoir... ne les laissez dicter votre vie...

----------------------------

Je compte parler de tout ça dans ce blog en essayant d'être le plus objectif : le billet de blog précédant ne fait surement pas rêver, mais il est réaliste. Le suivant, qui traitera de tout l'administratif lié à l'installation idem. 
Mais viendront après des choses intéressantes, que je constate déjà au quotidien, entre autres :
  • le bonheur médical/intellectuel de pratiquer la médecine que l'on veut, en appliquant ses propres règles, et le plaisir de voir l'attente d'une population concorder avec ses idéaux (non non, ils ne sont pas tous nostalgiques du prédécesseur, oui oui la nouvelle génération et ses nouvelles pratiques sont attendues). ⁵
  • l'exercice pluriprofessionnel déjà en cours de constitution et allant vers mon idéal de pratique (pas loin d'ailleurs de celui décrit par ASK en conclusion du 3ème article, avec quand même les contraintes du libéral). Une révolution, au moins locale.
En sachant vers quoi on va, en sachant le positif comme le négatif que l'on peut rencontrer, on peut mieux se faire son propre avis.

...
One light, one mind
Flashing in the dark
Blinded by the silence of a thousand broken hearts
For crying out loud she screamed unto me
A free for all
Fuck 'em all !
You are your own sight
'Cause I want to be the minority
...
Tu es ton propre point de vue...

Amis médecins non installés, à vous de vous faire votre propre point de vue, en espérant que ma contribution sur ce blog puisse vous y aider :-)

I want to be the minority 
I don't need your authority
Down with the moral majority
'Cause I want to be the minority



P.S. : je suis toujours preneur d'expérience d'autres personnes récemment installées ou en voie d'installation, que ça se passe bien ou pas, cela ne peut qu'enrichir le point de vue de nos lecteur ! Si vous voulez participer, faites signe :-)


¹ Concernant le travail en conformité avec mes idéaux (lutte contre l'omniprésence des conflits d'intérêts, et toutes les alternatives à l'Evidence Based Medicine), j'aurai presque pu aussi reprendre la même chanson, en un hymne à la minorité de médecins indépendants :-)

² Si la balance bénéfice/risque de l'installation s'inverse franchement, on reste encore libre d'abandonner (même si ce n'est pas forcément facile)

³ à propos du dénigrement général de la médecine générale, lire aussi ce billet : http://sous-la-blouse.blogspot.fr/2010/05/medecine-generale-forever.html

⁴ Heureusement, certains sages ne sont pas fatalistes, je retiens de Jacques Lucas "Gémir, pleurer, prier est également lâche"
bien explicité par Dzb17 : "c'est une invitation au stoïcisme : lis les 4 dernières lignes http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/alfred_de_vigny/la_mort_du_loup.html … #SouffreEtMeurtSansParler 
il est parfois plus sage d'assumer son rôle de promoteur et de testeur plutôt que de contempler une situation qui nous echappe et pour laquelle on se résigne, malheureux. Il n'est pas dit qu'on touche en se bougeant ou en tentant de bouger le contentement, mais le simple fait d'assumer son destin, de tenter de prendre à soi les choses aide. C'est une sorte d'invitation à ne pas se résigner.

⁵ PS : Heureusement, je ne suis pas seul :-)



vendredi 6 février 2015

(dé)collage imminent !

Bon, c'est bien mignon de faire un blog, mais faut bien l'entretenir. >1 mois d'installation, quasi 2 mois sans billet => au boulot ! Billet que je voulais écrire vers le jour de mon installation, puis finalement trop de trucs à gérer... j'ai beau être pro-installation, faut être honnête, l'installation est chronophage et complexe, je le développerai dans les prochains billets.



Donc, j'ai collé ma plaque.

Le 31 décembre exactement (1).

Rappel et précisions sur le contexte, que vous connaissez un peu déjà si vous avez lu les articles précédents :
3 MG > 65 ans dans un canton rural d'environ 4000 âmes en Z.R.R. (2). Projet de Maison/Pôle de Santé Pluriprofessionnel, MSP en construction, qui accueillera 2 couples de jeunes MG qui s'y installeront + un des anciens qui prolonge un peu (les 2 autres seront retraités), et regroupera les paramédicaux. Toujours est-il que cette fameuse MSP n'ouvrira au mieux qu'en automne. Et qu'un des MG actuels devait/voulait prendre sa retraite à la fin de l'année.

Pour ne pas laisser un vide et assurer la période de transition, il a bien fallu qu'un des 4 jeunes se dévoue. Il se trouve que nous sommes 2 couples, que nos 2 dames étant enceintes ce qui rend la tache plus complexe vu les conditions de travail, et que mon collègue ne passant sa thèse que fin décembre, je m'y suis donc "collé". Puis le "jeune retraité" m'avait plus ou moins désigné.

Me voila donc installé... dans des conditions que je n'aurai jamais imaginé accepter il y a quelques années :
Matin sans rendez-vous, après midi blindés qui finissent tard, pas de secrétariat en permanence (5 heures de secrétaire/ semaine pour l'administratif, secrétariat téléphonique théoriquement que pendant nos heures d'absence du cabinet), téléphone qui sonne ++, visites en campagne occupant presque la moitié du temps (et temps de rendez-vous pas extensible car 1 cabinet utilisé en alternance par 2 médecins associés => utilisé à plein temps), visites de labos très visibles, quelques habitudes médicales peu conformes à l'état actuel de la science, cabinet médical en friche depuis des années, dossier quasi pas informatisés, "rachat" de patientèle (3)...
ça vous fait rêver hein ? ;-)

En pratique ça fait plus de 2 ans que j'y travaille régulièrement (d'abord dernier stage SASPAS en dérogation un jour par semaine, puis remplas réguliers). Du coup j'ai pris mes marques progressivement. Et je passais sur les imperfections du cabinet et certaines obligations, ne pensant pas que je m'installerais là avant d'être dans une belle MSP bien organisée. J'ai quand même travaillé au fur et à mesure pas mal à l'informatisation des dossiers et au changement petit à petit des habitudes médicales, ce qui a par ailleurs été bien respecté par "les anciens". Puis le contact avec la patientèle s'est fait dans la douceur, progressivement, ça c'est un gros plus, autant pour les patients que pour le médecin !
Ce qui fait que même sans être installé, même si ce n'était pas ce dont j'avais rêvé pour commencer, j'étais quand même déjà un peu chez moi.

Puis en octobre, mon prédécesseur m'a annoncé que pour diverses raisons, entre autre comptables, il allait arrêter à la fin de l'année, et il voulait que je prenne la suite.

Et c'est à partir de là que le branle-bas de combat a été enclenché, pour faire tout un tas de démarches nécessaire à mon installation en moins de 3 mois... dont je vous parlerai dans le prochain billet :-)



(1) S'installer un 31/12, curieuse date n'est-ce pas ? En fait ce choix nous arrangeait : mon prédécesseur car son comptable lui avait dit que c'était plus simple de ne pas commencer 2015, et moi car pour être certain de bénéficier d'une exonération d'impôt lié à l'installation en ZRR (cf (2)) il me fallait être en règle au plus tard fin 2014 (le flou régnant à l'époque sur le fait de la reconduction ou non de ces mesures en 2015, et si oui dans des condition peut-être moins avantageuses).

(2) Z.R.R. = Zone de Revitalisation Rurale : ensembles de communes rurales reconnues comme fragiles, et bénéficiant à ce titre d'aides d'ordre fiscales :
En quelques mots : exonération temporaire de CFE, Exonération d'impôt sur le revenu totale pendant 5 ans, 75% la 6ème année, 50% la 7ème, 25% la huitième, puis fini. Conditions d'accès assez précise (et services fiscaux très regardant sur les détails il parait, cf (3)).
Bref : mesure très intéressante financièrement, favorisant l'installation et le maintien au moins 5 ans (sous peine de rembourser l'exonération).
3 remarques :
- mesure non spécifique au milieu médical, valable pour toute entreprise répondant aux conditions d'accès
- le village ou je m'installe, malgré sa démographie médicale catastrophique (les 3 médecins > 65 ans), ne bénéficiait d'aucune classification spécifique par l'ARS (pas "zone fragile" ou "déficitaire") et donc d'aide spécifique. Après discussion, l'ARS nous propose quand même (avec insistance) le contrat PTMG (DocMaman en parle très bien ici)... on y réfléchi encore, peut-être plutôt pour nos dames quand elles s'installeront (donc encore une fois ce n'est pas le PTMG qui pousse à l'installation, mais l'opportunité qui fait contractualiser, l'ARS et le ministère se réjouissant pourtant du "succès de cette mesure qui fait s'installer pleins de médecins dans les déserts").
- je fais partie de ceux qui disent que "Les sous c'est pas la solution" aux déserts médicaux. Bon là quand même c'est conséquent, c'est + que le PTMG et le CESP, je n'y crache pas dessus. Pour autant, ma décision de m'installer là s'est faite avant qu'on me parle de ces mesures, devant la promesse d'une belle histoire, comme j'en parlais dans l'article précédent. Et je trouve beaucoup plus incitatif le stage en dérogation accordé par ARS/DUMG ainsi que le projet de MSP et le fait que des moyens (financiers et organisationnels) y soit alloués par l'ARS et les collectivités. Sans ZRR, je m'installais, sans projet de Pôle de Santé, non.

(3) Et oui, vous avez bien lu "rachat de patientèle" malgré tout ça. Et encore, mes anciens collègues parlaient de clientèle. Juridiquement c'est une "convention de successeur et de présentation de clientèle civile", et les patients sont parfaitement libres de changer de crèmerie en récupérant leurs dossiers. Le caractère absurde de cette pratique datant d'une époque faste de la médecine libérale a souvent été débattu, entre autre ici sur Twitter. Pour autant, dès les premiers contacts avec les médecin du coin, un des 3 médecins (en l’occurrence celui à qui j'allais succéder, qui pensait déjà à sa retraite) évoquait ce sujet, promettant "un prix cadeaux" (12000€ quand même !!!). Au grès de longues discussions, j'avais réussi à le convaincre (aidé par ses confrères plus réalistes) qu'il n'en serait pas questions, et n'en ai quasi plus entendu parler à part dans quelques regrets qu'il émettait. Puis, à l'annonce de son départ en retraite, je me suis renseigné auprès de juristes sur les conditions d'accès à l'exonération ZRR, très précises, il se trouve que pour les impôts, très regardants au vu des sommes en jeu, considérant la coïncidence de son départ et de mon arrivé comme une succession ou plutôt une reprise d'entreprise, pour être dans les clous et toucher l'exonération il me fallait absolument racheter un fond de commerce, à une somme significative, on m'avait conseillé au moins 2000 à 3000€ (plus les honoraires élevés d'un avocat pour les papiers en règle), que ça passerai vu le contexte de pénurie médicale. Et bien il m'en a redemandé la même prix qu'au départ ! Que j'ai quand même réussi à diviser par 2, non sans difficultés.
Bref, j'ai bien galéré administrativement (complexe +++ à monter les dossiers), et finalement "acheté une patientèle" alors que j'étais fondamentalement contre, et oui... en espérant que l'exonération ne saute pas pour une raison ou une autre.


Trêve de galéjades administratives, suite des événements au prochain épisode !

Fluctuat nec mergitur

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